Dans un article précédent, je proposais un cadre méthodologique en matière d’accompagnement à l’emploi. Cette proposition se voulait commune à un ensemble d’acteurs de l’insertion.
Ce faisant, l’idée était que, dans le monde de l’insertion, on pouvait se servir de cette méthodologie pour guider sa pratique.
Aussi, quelques enseignements issus du premier article méritent d’être rappelés :
- La nécessité d’un cadre commun aux acteurs de l’insertion
- Un tel cadre peut être représenté de manière linéaire mais aussi (et surtout) circulaire
- L’enchaînement des étapes au sein du parcours ne se veut pas mécanique mais stratégique et souple
Servons-nous de ces points comme d’une base à partir de laquelle nous pourrons poursuivre notre réflexion. En particulier, l’article d’aujourd’hui consistera à ajouter deux idées : d’une part, l’idée du profilage et d’autre part, la mesure de la pertinence de sa pratique grâce à l’utilisation de la donnée.
Cela dit, l’objectif général de ces deux articles est identique. Il consiste à répondre à la question : comment puis-je réaliser un accompagnement adapté à chaque public?
Je ne pense pas qu’il existe un modèle universel. Il y a en réalité des pratiques et façons de faire différentes, adaptatives, qui s’appuient elles-mêmes sur différents niveaux de connaissances et d’expertises (vis-à-vis du public, du marché de l’emploi, du contexte local,…).
Dans ce qui suit, je montrerai un exemple de processus pratique d’accompagnement qui suit des principes que je considère comme efficaces au regard des publics rencontrés et des ressources disponibles.
Parties de l’article
- Un nouvel éclairage grâce au profilage
- Le choix des critères d’insertion pertinents
- Un nouveau modèle qui alimente et enrichit l’expertise
Un nouvel éclairage grâce au profilage
Le profilage consiste à rassembler un ensemble d’informations clés au sujet de la personne (données administratives et déclaratives, caractéristiques personnelles et préférences,…) afin de déterminer des profils qui permettront d’orienter rapidement vers des ressources adaptées (données sur le marché de l’emploi, offre de services, offres d’emploi,…).
Certaines données d’un profil ainsi établi, considérées isolément ou en combinaisons, produisent un sens particulier lorsqu’elles sont rassemblées et mises en évidence sous l’éclairage d’un cadre général.
Ce premier temps est celui de l’analyse de la situation sur base du dossier.
➡ Ex. 1 : l’âge et le type d’études réalisées vont être déterminants pour l’accès à des allocations de chômage sur base des études.
➡ Ex. 2 : ces deux critères combinés à la réalisation d’un stage d’insertion professionnelle (et des obligations qui y sont liées) permettront l’accès au jeune à ces allocations.
Deux types de profilages
Au sein d’un cadre général, un ensemble de situations peuvent être interprétées tout d’abord sur base de critères administratifs, comme nous l’avons vu dans les exemples qui précèdent.
En second lieu, un profilage plus ciblé peut être réalisé au cas par cas sur base d’une expertise individuelle. L’avantage de l’expertise est qu’elle rend l’analyse plus fine et assouplit la démarche d’orientation ; elle permet aussi parfois d’emprunter quelques raccourcis.
➡ Ex.1 : le lien pouvant être fait entre l’expérience récente et l’efficacité de certains dispositifs et aides a l’emploi.
➡ Ex.2 : la détermination d’un degré d’autonomie et la rapidité d’insertion vers l’emploi.
Les deux démarches se soutiennent, l’une garantissant l’égalité de traitement et l’universalité de l’accès à certains droits/services, l’autre cherchant avant tout à agir avec efficacité.
❌ Le profilage ne peut se réduire aux critères administratifs ; sa finalité est avant toute chose d’orienter la personne vers l’emploi et pas uniquement vers des services.
✅ Le deuxième type de profilage – sur base de l’expertise individuelle – rend possible une insertion durable, guidée par un souci d’efficacité dans la démarche.
✅ Il intervient aussi bien dans le cadre d’un conseil ponctuel que durant un accompagnement.
👉 Éléments clés 💡
> Le profilage reposant sur l’expertise individuelle est vaste ; cette expertise repose sur l’expérience et les connaissances acquises
> Ce type de profilage peut se fonder notamment sur les caractéristiques des personnes accompagnées, de la zone où est implanté le service, sa démographie, du marché de l’emploi local,…
> Il augmente l’efficacité de l’accompagnement tout en s’inscrivant dans un cadre légal et réglementaire global
> Il est possible de formaliser les aspects principaux du profilage reposant sur l’expertise individuelle.
Le choix des critères d’insertion pertinents
Dans l’article précédent, une trame commune a été proposée ; celle-ci contient un ensemble de thématiques à utiliser à chaque stade de l’accompagnement. Elle s’accompagne également d’une question censée représenter l’idée générale de chacun de ces stades, ainsi que des indications pour guider la pratique.
Ce qu’il faut saisir c’est qu’il s’agissait là d’une proposition, sous la forme d’un modèle, utile, me semble-t-il, à alimenter la pratique et à la rendre fluide.
Deux possibilités d’utilisation
La proposition de trame commune peut donc aussi s’envisager comme un outil supportant la pratique. Deux possibilités de lectures, qui correspondent à deux réalités différentes, s’ouvrent alors :
- Une première, verticale, située sur chacune des étapes et qui intervient lors d’un entretien d’information ponctuel.
- Une deuxième, qui peut se visualiser de manière horizontale, recouvre une situation d’accompagnement impliquant des suivis réguliers.
Le deuxième temps proposé est celui de la construction d’un dispositif d’accompagnement souple et adapté à chaque situation.
Ce deuxième temps intervient après le profilage et est mis en œuvre assez rapidement dans le cadre d’un accompagnement.
« Souple » et « adapté » car il tient compte des opportunités et contraintes individuelles tout en étant orienté vers une insertion durable.
Cette insertion se réalisera grâce à l’ajout d’un élément essentiel qui rendra la démarche véritablement « artisanale », à savoir : l’identification des critères d’insertion pertinents et leur mobilisation afin de les appliquer à une situation précise.
Ainsi, à l’aide de ce point de départ, les différents moments de rencontre répartis dans le temps viendront consolider le parcours ou adapter celui-ci en y intégrant de nouveaux éléments.
On peut alors imaginer, lors du bilan et de la construction du plan d’action, un ensemble de blocs qu’il s’agirait d’assembler au fur et à mesure d’une certaine manière pour parvenir à une situation désirée. Cet assemblage procède d’un choix conscient du professionnel en charge du pilotage de la démarche.
Pourquoi suggérer telle action plutôt qu’une autre à ce moment précis?
✅ En premier lieu, ce choix se base sur les deux types de profilages, comme évoqué au premier point.
✅ Ensuite, la connaissance de l’autre, c’est-à-dire la relation créée et entretenue par la suite, permet de formuler des pistes d’insertion sur mesure.
Par « démarche artisanale », j’entend toute création de valeur par le biais d’un savoir-faire humain. Au centre de cette démarche, il existe un aspect qui ne pourra pas être digitalisé car il revient à décider qualitativement entre plusieurs options, bien au-delà d’une analyse froide : le pilotage de la démarche sur base des informations, d’un contexte et parfois d’un ressenti.
Les actions ultérieures à mener sont étroitement liées à la qualité du profilage et au choix des critères d’insertion pertinents appliqués à chaque situation.
➡ Exemple : l’adaptabilité et la souplesse sont essentiels afin de mener à bien un accompagnement.
Le rythme ou le choix de certaines actions tiendront compte des impératifs vécus par la personne à moment donné. Cela pourra passer par une réévaluation de la situation à l’aide d’éléments de contexte, quitte à inclure des actions non prévues au départ.
Un nouveau modèle qui alimente et enrichit l’expertise
Entre chaque action réalisée et en bout de course, en fin d’accompagnement, il s’agit de faire un suivi des démarches avec l’intention d’alimenter les facteurs de succès – voir d’en dégager de nouveaux – lorsqu’une personne atteint une situation souhaitée. Pour rendre cela possible, de telles situations devront être définies préalablement.
C’est le temps du suivi et de la construction d’un modèle d’apprentissage.
👉 Remarque : le modèle dont je fais référence ici est à distinguer du modèle méthodologique – l’outil de support à la pratique – proposé a priori.
Le suivi et l’analyse des démarches réalisées grâce à un modèle permet à la fois de mesurer la pertinence de sa pratique et de l’améliorer constamment grâce aux données. Cette démarche participe à la construction de nouveaux cadres, porteurs d’insertion.
S’agissant d’une technologie s’appuyant sur les données, il est clair que plus le modèle sera enrichi en données et plus les prédictions seront pertinentes. De plus, ces données devront être qualitatives, au risque de ne pas pouvoir les traiter adéquatement.
> En résumé, nous avons donc un flux composé de trois séquences :
Un profilage a priori ⬇ La construction d’un parcours souple et adaptatif à partir de choix pertinents ⬇ Une prédiction via la construction d’un modèle à partir des données disponibles |
Dans ce contexte-là, la technologie devient un véritable support d’une pratique avant tout humaine, de type « artisanale », qui est la fois soutien humain souple et adaptatif et qui crée de la valeur. Cette valeur est humaine, sociale et sociétale.
Vous souhaitez recevoir ma newsletter hebdomadaire ? 👉 Suivez le lien par ici : http://eepurl.com/hKrMu5 Vous serez redirigés vers le formulaire d’inscription 😉 À tout de suite! |